C'est sur un groupe de discussion facebook que j'ai lu récemment que le Pr Leboyer (une des spécialistes françaises de l'autisme), se ferait traiter de "sorcière" par certains de ses "collègues" (des collègues psychiatres psychanalystes, peut-être? Des copains de la Milivudes?!). Et hier j'ai regardé un peu Harry Potter et la coupe de feu..., donc voilà, chacun ses références cinématographiques...
Le Pr Leboyer est très branchée neuroinflammation, immuno-psychiatrie, et il est possible, qu'en conséquence, elle aussi s'intéresse à la psychiatrie nutritionnelle, dont il est question dans cet article que je traduis ici, pour les français quiches en anglais: un article du site web "Harvard Health Publications", publié par la Harvard Medical School.
Par le Dr Eva Selhub, 16 novembre 2015:
Psychiatrie nutritionnelle: Votre cerveau sous alimentation
Pensez-y. Votre cerveau est toujours
allumé. Il gère vos pensées et vos mouvements, votre respiration
et vos battements de cœur, vos sens, il travaille dur 24H/24, 7
jours/7, même lorsque vous dormez. Cela signifie que votre cerveau
requière un approvisionnement en carburant constant. Ce
« carburant » provient de la nourriture que vous ingérez,
et ce que contient ce carburant fait toute la différence. Pour faire
simple, ce que vous mangez affecte la structure et le fonctionnement
de votre cerveau et, ultimement, votre humeur.
Comme une voiture de luxe, votre
cerveau fonctionne au mieux lorsqu'on lui fournit du carburant de
qualité « premium ». Manger une nourriture de haute
qualité qui contient beaucoup de vitamines, de minéraux,
d'anti-oxydants nourrit le cerveau et le protège du stress oxydatif
– ces déchets (radicaux libres) produits lorsque le corps utilise
de l'oxygène, et qui peuvent endommager les cellules.
Malheureusement, tout comme une voiture
de luxe, votre cerveau peut être endommagé si vous ingérez quoi
que ce soit d'autre que du carburant « premium ». Si des
substances contenues dans du carburant bas de gamme (tels que celles
contenues dans les aliments industriels et raffinés) atteignent le
cerveau, il a peu de façon de s'en débarrasser. Les alimentations
riches en sucres raffinés, par exemple, sont dommageables pour le
cerveau. En plus d'être problématiques pour la régulation de
l'insuline, elles favorisent l'inflammation et le stress oxydatif. De
multiples études ont trouvé une corrélation entre un régime riche
en sucres raffinés et un fonctionnement cérébral altéré – et
même une aggravation des symptômes des troubles de l'humeur, comme
la dépression.
C'est sensé. Si votre cerveau est
privé d'une nutrition de haute qualité, ou si les radicaux libres
ou des cellules pro-inflammatoires circulent dans le cerveau,
contribuant à endommager les tissus cérébraux, il va y avoir des
conséquences. Ce qui est intéressant, c'est que pendant de
nombreuses années, le champ de la médecine n'a pas pleinement
reconnu la connexion entre humeur et alimentation.
Aujourd'hui, heureusement, le champ
bourgeonnant de la psychiatrie nutritionnelle découvre qu'il y a de
nombreuses conséquences et corrélations entre, non seulement ce que
vous mangez, comment vous vous sentez, et comment vous vous
comportez, mais aussi le type de bactéries qui vivent dans vos
intestins.
Comment la nourriture que vous
mangez affecte la façon dont vous vous sentez
La sérotonine est un neurotransmetteur
qui aide à réguler le sommeil et l'appétit, module votre humeur,
et inhibe la douleur. Puisque environ 95% de votre sérotonine est
produite dans votre système digestif, et que votre système digestif
est tapissé de cent millions de cellules nerveuses - ou neurones,
c'est logique que le fonctionnement de votre système digestif ne
soit pas seulement responsable de la digestion de votre nourriture,
mais guide vos émotions. Et qui plus est, le fonctionnement de ces
neurones – et la production de neurotransmetteurs, comme la
sérotonine, est hautement influencée par les milliards de
« bonnes » bactéries qui constituent votre microbiome.
Ces bactéries jouent un rôle essentiel dans votre santé. Elles
protègent la paroi de vos intestins et forment une barrière solide
contre les toxines et les « mauvaises » bactéries ;
elles limitent l'inflammation, elles améliorent l'absorption des
nutriments contenus dans votre alimentation, et elles actionnent des
circuits neuronaux qui relient directement les intestins et le
cerveau.
Des études ont montré que lorsque des
gens prennent des probiotiques (des compléments contenant de bonnes
bactéries), leur niveau d'anxiété, leur perception du stress, leur
tournure d'esprit s'améliorent, comparé à des gens qui n'en ont
pas pris. D'autres études ont comparé des régimes traditionnels,
comme le régime méditerranéen et l'alimentation japonaise
traditionnelle, à une alimentation occidentale typique ["moderne"] et ont montré
que le risque de dépression est 25% à 35% inférieur chez ceux qui
consomment une alimentation traditionnelle. Les scientifiques expliquent ces
différences par la richesse de ces alimentations traditionnelles en
légumes, fruits, céréales complètes, poisson, fruits de mer, et
leur faible teneur en viande grasse et laitages. Elles sont aussi
dépourvues d'aliments industriels et raffinés et en sucres, qui sont
les bases du régime occidental. De plus, beaucoup de ces aliments
non-industriels sont fermentés, et agissent donc en probiotiques
naturels. La fermentation utilise des bactéries et des levures pour
convertir les sucres en dioxyde de carbone, en alcool, en acide
lactique. Elle est utilisée pour conserver les aliments et leur
donner un goût et une texture agréable.
Cela peut vous sembler invraisemblable,
mais la notion que les bonnes bactéries, non seulement influencent
ce que vous digérez et ce que vous assimilez mais affectent le
niveau d'inflammation dans tout votre corps, ainsi que votre humeur
et votre niveau d'énergie, cette notion gagne en popularité parmi
les chercheurs. Les résultats ont été assez extraordinaire jusque
là.
Qu'est-ce que cela signifie pour
vous ?
Commencez à
prêter attention à comment vous vous sentez après avoir mangé
différents aliments – pas seulement dans l'instant mais le
lendemain. Essayez d'avoir une alimentation « propre »
pendant 2 à 3 semaines – ce qui signifie supprimer tous les
aliments industriels et le sucre. Ajoutez des aliments fermentés,
comme le kimchi, le miso [non pasteurisé, NDLT], la choucroute, les
pickles, ou le kombucha [en magasin bio! NDLT]. Vous pourriez aussi
tenter une alimentation sans laitages – et certaines personnes se
sentent même mieux quand leur alimentation est sans gluten. Voyez
comment vous vous sentez. Ensuite, réintroduisez les aliments
[transformés] un par un, et voyez comment vous vous sentez.
Quand mes patients
passent à une alimentation « propre », ils ont du mal à
croire à quel point ils se sentent mieux à la fois physiquement et
émotionnellement, et à quel point ils se sentent plus mal quand ils
réintroduisent les aliments connus pour favoriser l'inflammation
[aliments industriels, sucre, gluten...]. Essayez !
Pour plus
d'information sur ce sujet, voir « Nutritionnal medicine as
mainstrem in psychiatry », Sarris J, et al. Lancet Psychiatry.
2015.
Le champ de la
psychiatrie nutritionnelle est relativement récent, cependant il
existe des données relatives à l'association entre la qualité de
l'alimentation et la santé mentale dans différents pays, cultures
et groupes d'âge – sur la dépression en particulier. Voici
quelques liens vers des revues et meta-analyses :
http://ajcn.nutrition.org/content/99/1/181.longhttp://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23720230
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4167107/Il existe maintenant 2 études suggérant qu'une amélioration de l'alimentation peut prévenir la dépression :
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3848350/
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4050338/
L'alimentation durant les premières années de la vie est aussi lié à la santé mentale des enfants :
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/24074470
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25524365
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/23541912
De nombreuses données sur les animaux montrent que les modifications de l'alimentation affectent la plasticité cérébrale et il existe maintenant des données sur les humains qui suggèrent la même chose :
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4563885/
Finalement, une étude à venir sur le traitement de la dépression via une amélioration de l'alimentation, et dont les résultats devraient être publiés prochainement.
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3636120/
Autre lien sur le sujet : Healthy eating : A guide to the new nutrition http://www.health.harvard.edu/special-health-reports/healthy-eating-a-guide-to-the-new-nutrition?utm_source=HHPBlog&utm_medium=link&utm_content=related-text&utm_campaign=referral